Bernard-Henri Lévy, le plus médiatique de nos philosophes français, ne croit « pas à une vague initiation à la philosophie ». Pourtant à la rentrée 2011, la philosophie, dispensée jusqu’à présent aux seuls élèves de terminale, pourra être enseignée en classe de seconde et de première dans certains lycées. Le ministre de l’Education nationale a en effet annoncé vouloir « expérimenter un enseignement » de cette discipline « plus tôt, en seconde et en première » hier lors de la journée mondiale de la philosophie organisée par l’Unesco à Paris. Selon Luc Chatel, les enseignants de philosophie pourront enseigner l’éducation civique, juridique et sociale » (ECJS), un cours d’une demi-heure hebdomadaire actuellement dispensé par les professeurs d’histoire-géographie aux élèves de seconde et première des séries générales.
Par ailleurs dans les établissements volontaires, le ministère mettra en place à la rentrée une expérimentation nationale pour aborder la philosophie en seconde et en première, en plus de l’ECJS : d’une part au travers des « enseignements d’exploration » créés par la réforme du lycée (deux modules obligatoires au choix, tels « littérature et société », « images et langages » et « méthodes et pratiques scientifiques ») ou lors d’« ateliers » organisés dans le cadre des deux heures hebdomadaires d’ accompagnement personnalisé ».
Enfin, le minsitre de l’Education estime que les enseignants de philosophie doivent pouvoir « intervenir de manière ciblée au sein des cours d’autres disciplines ». Par exemple, en physique-chimie, un prof de philo pourra « éclairer la portée philosophique » de l’étude de la structure et la matière, en abordant les notions « d’espace » ou de « relativité ». Par ailleurs, le ministre donne « toute liberté aux équipes pour concevoir d’autres projets », sur la base du volontariat. Hier, le ministère n’était cependant pas en mesure de préciser le nombre des lycées susceptibles de participer à l’expérimentation. Actuellement, 250 établissements sur un peu plus de 4 000 proposent de leur propre chef une initiation à la philosophie en première. «Je me bats depuis longtemps pour que la philosophie soit enseignée dès la primaire. Je trouve que l’instaurer en seconde, c’est une excellente initiative, il faudrait ensuite le faire au collège, en primaire, en maternelle », a souligné de son côté le philosophe Michel Onfray en désaccord avec BHL. Un nouveau sujet de philo est né !
Les intellectuels sont partagés mais les Français sont très branchés
« Pas opposée à la philo avant la terminale », l’Association des professeurs de philosophie de l’enseignement public (Appep)critique le caractère « non contraignant » et « flou » du dispositif. Elle rappelle aussi qu’il n’existe « pas de profs de philo en surnombre aujourd’hui » contrairement à ce qu’affirme Luc Chatel.
L’Association pour la création d’instituts de recherche sur l’enseignement de la philosophie (Acireph), demandeuse de cette évolution, estime au contraire qu’il s’agit d’une « excellente nouvelle » et souligne qu’en Espagne, Italie et Portugal, la philosophie fait partie du cursus obligatoire pendant deux à trois ans au niveau lycée. On retrouve le même clivage chez les intellectuels entre Bernard-Henri Lévy et Michel Onfray (lire ci-dessus). Elisabeth Roudinesco, historienne et psychanalyste, philosophe de formation, met en garde: «Si on veut réduire la philosophie à des sujets de société (..), si on veut dissoudre la philosophie dans des matières qui n’en sont pas, je ne suis pas d’accord ».
Festivals, cafés, revue philosophiques : sans se prendre forcément pour Descartes, de plus en plus de Français ont en tout cas individuellement recours à la philosophie pour répondre à leurs interrogations. « Philosophie Magazine », créé en 2006, connaît un « succès croissant » dans un contexte pourtant morose pour la presse écrite.
Source: LeProgrès.fr
Pour ou contre, qu'en pensez - vous ?
