Des familles de victimes de l'attentat accusent l'ex-président, Jacques Chirac, et son ancien secrétaire général, Dominique de Villepin, de mise en danger de la vie d'autrui et d'homicide involontaire. L'ancien premier ministre demande à être entendu par la justice «le plus rapidement possible».
Après Edouard Balladur et Nicolas Sarkozy, Jacques Chirac et Dominique de Villepin sont à leur tour pointés du doigt dans l'affaire Karachi. Des familles de victimes de l'attentat de 2002 vont porter plainte contre l'ancien président et son ex-secrétaire général de l'Élysée pour «mise en danger de la vie d'autrui» et «homicide involontaire», a annoncé vendredi leur avocat, Me Olivier Morice.
Depuis plus d'un an, l'enquête sur l'attentat de Karachi en 2002 suit la piste de représailles pakistanaises à l'arrêt, décidé en 1995 par Jacques Chirac, du versement de commissions sur la vente de sous-marins Agosta promises par le gouvernement d'Édouard Balladur.
De «très forts soupçons» de rétrocommissions
Jeudi, un nouveau témoignage devant le juge Renaud Van Ruymbeke, chargé de ce volet de l'affaire, est venu accréditer cette thèse. Selon Michel Mazens, ancien PDG d'une société de commercialisation de matériels militaires (la Sofresa), l'arrêt du versement des commissions dans le contrat Agosta a bien été ordonné depuis le plus haut sommet de l'État en 1995. À cette époque, Jacques Chirac vient tout juste d'arriver à l'Élysée et son secrétaire général est Dominique de Villepin.
Vendredi soir sur TF1, l'ancien premier ministre a affirmé vouloir être entendu dès la semaine prochaine par le juge Van Ruymbeke, et a confirmé l'existence de «très forts soupçons» de rétrocommissions vers la France en 1995, en marge de contrats d'armement.
L'Elysée dénonce des «insinuations»
Un peu plus tard dans la soirée, l'Elysée a réagi aux accusations dans un communiqué, en déplorant les «insinuations» et les «allégations calomnieuses» visant Nicolas Sarkozy. Cette affaire «ne le concerne en rien», a affirmé la présidence sous la plume de Claude Guéant. «Nicolas Sarkozy n'a par ailleurs jamais été le responsable, ni le trésorier, de la campagne de M. Edouard Balladur [en 1995]. Il en était le porte-parole», souligne également l'Elysée à propos des soupçons de financement illégal de la campagne Balladur en 1995, auquel l'attentat de Karachi pourrait être lié. «Dans cette affaire, le président de la République n'a d'autre souci que celui de la vérité due aux familles des victimes», conclut Claude Guéant.
Selon Michel Mazens, le risque pour les ingénieurs français travaillant au Pakistan en cas d'arrêt du versement des commissions promis par le versement du gouvernement Balladur était pourtant connu. Lorsqu'il a demandé à Dominique Castellan, alors patron de la DCN-I (la branche internationale de la Direction des constructions navales) de cesser le versement des commissions, celui-ci lui aurait en effet répondu que cela allait «faire courir des risques à ses personnels».
«On a privilégié l'arrêt d'un contrat, au risque de sacrifier le personnel», en conclut Me Morice. «Notre plainte va viser le cheminement menant à la décision d'arrêter les commissions.» Pour sa défense, Dominique de Villepin a assuré vendredi soir qu'il n'avait eu à l'époque «aucune information spécifique circonstanciée» sur un risque terroriste en cas d'arrêt de versement des commissions.
Source: LeFigaro.fr