mardi 30 novembre 2010

Fillon veut inscrire les déficits dans la Constitution

fillon constitution ump libanLors de son discours de politique générale, François Fillon a réaffirmé sa volonté d'inscrire dans la Constitution des «principes garantissant la maîtrise des finances publiques».
La volonté de l'exécutif se heurte à l'opposition des socialistes et des souverainistes de la majorité.

Rassurer, avant tout. Alors que les difficultés de l'Irlande, après celles de la Grèce, mettent à mal l'Europe et l'euro, le gouvernement souhaite faire de la lutte contre les déficits une obligation constitutionnelle, sur le modèle de la «règle d'or» instaurée en Allemagne. Lors de son discours de politique générale, mercredi dernier, François Fillon a en effet réaffirmé sa volonté d'inscrire dans la Constitution des «principes garantissant la maîtrise des finances publiques».


Un projet évoqué en mai par Nicolas Sarkozy, lors de la conférence des déficits. Inspirée des travaux de l'ancien patron du FMI Michel Camdessus, cette réforme «ferait obligation à chaque gouvernement issu des urnes de s'engager pour cinq ans sur une trajectoire de déficits», avait précisé le président. Autre obligation: fixer la « date à laquelle l'équilibre des finances publiques est atteint». En Allemagne, qui va plus loin, la Constitution impose pour 2016 un déficit limité à 0,35% du PIB.

«L'impossible consensus»

Le gouvernement doit saisir prochainement les groupes politiques d'un «document d'orientation», afin de « voir si un consensus peut être atteint sur cette question», a précisé François Fillon mercredi. «Le premier ministre commencera sans doute les consultations début 2011, indique-t-on à Matignon. Ce sera le sujet du début d'année.» À l'Élysée, on indique que ce sujet sensible relève de Matignon: «C'est le premier ministre qui gère, on ne peut pas tout faire», argue un conseiller du président.

Si la crise de l'euro accentue la nécessité de se plier à une plus stricte orthodoxie budgétaire, le sujet n'en demeure pas moins délicat. Une modification de la Constitution implique de soumettre le projet à référendum (ce qui est peu probable à quelques mois d'une présidentielle). Ou d'obtenir une majorité des trois cinquièmes au Parlement, réuni pour l'occasion en Congrès à Versailles. En 2008, la révision constitutionnelle n'était passée qu'à deux voix. Cette fois-ci, un consensus est peu probable, la gauche étant opposée à l'instauration de cette «règle d'or» à la française. «Ils se foutent de nous, s'agace l'ancien ministre socialiste Michel Sapin. Celui qui a le plus creusé les déficits depuis la Libération voudrait imposer des règles contraignantes à ses successeurs sans les avoir respectées lui-même.» En outre, le PS ne veut pas entendre parler d'une loi qu'il serait possible, selon Michel Sapin, «de modifier le lendemain même de son vote».

Changer la Constitution pour introduire une obligation d'équilibre des finances publiques suscite aussi des réticences au sein de la majorité, notamment chez les souverainistes. « S'il faut faire des déficits pour relancer l'activité, on ne doit pas en être empêché par une règle juridique, s'agace le député UMP Jacques Myard. Restons souples et pragmatiques.»

Conscient de ces écueils, l'exécutif entend bien en tirer profit. À un député s'inquiétant à l'Élysée de «l'impossible consensus» sur ce sujet, Nicolas Sarkozy avait répondu, dans un sourire «La gauche devra en assumer la responsabilité…!» « Le PS n'est pas à l'aise sur le sujet, décrypte le député Nouveau Centre Charles de Courson. C'est difficile de dire: “Vive les déficits!”, surtout quand nos voisins font faillite…»

Au-delà de l'objectif tactique, l'exécutif cherche aussi à rassurer les marchés, et donner des gages à l'Allemagne, qui fait pression sur ses partenaires de la zone euro pour obtenir l'inscription d'un plafond de déficits dans leur Constitution. « Il s'agit de montrer à la communauté internationale que nous avons une volonté, poursuit Charles de Courson. Si la réforme constitutionnelle n'est pas possible, le gouvernement peut aussi faire le choix de modifier la loi organique relative aux lois de finances (Lolf). Même si, évidemment, une modification de la Constitution aurait une portée symbolique plus forte!» Un «plan B» qui n'est pas encore à l'ordre du jour. «Voyons déjà quelle sera la prise de conscience des uns et des autres», indique un conseiller du premier ministre.

Source : Le Figaro
Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...

Articles les plus consultés