Si le président fait de 2011 une "année utile" pour les réformes, il va profiter des prochains mois pour rassurer et séduire de nouveau ses électeurs de la majorité en pleine doute.
Nicolas et Carla Sarkozy à pied dans les rues de Paris. 13h45, samedi: le Président et la première dame s’offrent un moment de détente et décident de déjeuner dans un restaurant du 8e arrondissement. Au lendemain de ses voeux aux Français, le chef de l’Etat se rassure en constatant la "gentillesse" des passants qu’il croise. Il semble surtout satisfait de son intervention télévisée. Onze millions de téléspectateurs l’ont regardée. "C’est 900.000 de plus que l’année dernière. Qu’est-ce que ce serait si j’étais populaire!" se félicite-t-il alors que sa cote de confiance est au plus bas.
Des voeux de combat. Sarkozy s’est plutôt bien sorti de cet exercice toujours artificiel. Debout dans la salle des fêtes de l’Elysée, il a ciselé un message habile, même s’il a versé par moments dans l’autosatisfaction. Tout en promettant de nouvelles réformes, il a dessiné le portrait du futur candidat à sa réélection: celui d’un Président protecteur, avocat de l’euro et défenseur de la laïcité. 2012? Il y pense et il en parle. Aucun de ses prédécesseurs n’avait osé évoquer, lors des sacro-saints voeux aux Français, même à mi-mot, la future élection présidentielle un an et demi avant l’échéance. Nicolas Sarkozy, lui, l’a fait. Sans hypocrisie. Sans excès non plus. Le Président a, certes, expliqué qu’avant 2012 il y avait 2011. Et qu’il entendait faire des douze prochains mois une "année utile". Une expression directement empruntée… à Jacques Chirac. Son prédécesseur l’avait utilisée en 2001. Mais le seul fait de parler du "rendezvous électoral" de 2012 prouve que Nicolas Sarkozy ne pense plus qu’à ça. Sa réélection.
S’appuyer sur Fillon. Dans les neuf minutes de son allocution, tout y est déjà. Cela ressemble à des voeux de combat. Ses thèmes de campagne (sécurité, immigration, délocalisations, défense de l’euro), sa méthode électorale et des messages à ses adversaires de gauche et de droite. Mais en 2011, c’est la droite qu’il veut d’abord rassurer, voire reconquérir. Une partie des électeurs de 2007 est déçue. Préfère François Fillon. Rêve de Jean-Louis Borloo. Regarde du côté de Marine Le Pen. "Tous les mois, la presse m’invente un nouveau champion ou une nouvelle championne", confie-t-il en privé sans plus d’inquiétude en dressant la liste: De Villepin à Aubry, de Fillon à Borloo et Marine Le Pen. En cette année préprésidentielle, Sarkozy s’amuse déjà de voir les "autres" annoncer leurs candidatures à la file indienne. Lui attendra la fin de l’année pour se lancer. En attendant, il se réjouit de sa relation de travail avec Fillon qu’il a préféré garder à Matignon plutôt que d’en faire un rival. "Jamais, dit-on à l’Elysée, un président et son Premier ministre n’ont eu, au bout de trois ans et demi, aussi peu d’animosité."
Retourner au peuple. Conscient qu’il doit remanier son style qui a tant heurté les Français, Nicolas Sarkozy s’efforce, depuis la débâcle des régionales de 2010, d’offrir un profil plus zen, plus présidentiel. En 2011, il prévoit une "centaine de visites en province". "C’est comme ça depuis 2007", soupire-t-il. Mais le format a changé. Le Président n’y fait plus d’annonce et refuse de commenter l’actualité préférant expliquer ses réformes et discuter avec des Français dans des tables rondes sur des thèmes sensibles à droite (agriculture, santé, sécurité). Testée l’année dernière, cette stratégie du "retour au peuple" sera poursuivie en 2011. Début des opérations mardi à Saint-Dizier puis, le week-end prochain, aux Antilles. L’exercice avait plutôt réussi à Jacques Chirac en 2002. "Cela permet au Président d’avoir le contact en direct sans le filtre des médias", décrypte un conseiller. A part la conférence de presse du 24 janvier consacrée à la présidence française du G20, le chef de l’Etat devrait se faire rare dans les médias et limiter ses contacts avec les journalistes.
Neutraliser l’antisarkozisme. Après une année "rude" selon son mot, marquée par la réforme capitale des retraites, Sarkozy sait qu’il va devoir "cajoler" des centristes amers, des radicaux déçus, mais aussi renouer avec un électorat populaire tenté par un retour au vote FN. "Pour l’instant, ils se marchent sur les pieds dans l’antisarkozisme", minimise-t-on à l’Elysée tout en multipliant les signaux. Témoin: ce plaidoyer proeuropéen vendredi soir qui ne va sûrement pas déplaire aux électeurs centristes. Mais aussi cette ode à la laïcité, référence majeure des radicaux. Pour l’heure, Sarkozy ne semble pas croire à la montée en puissance de Marine Le Pen.
L'aide de Carla. L'année politique de la première dame commencera dès vendredi en Martinique. Elle accompagnera son mari aux Antilles puis déjeunera lundi avec Michelle Obama à Washington. Plus présente en 2010, elle devrait effectuer plusieurs déplacements en province. "Elle fait un parcours fantastique. Elle veut m'aider", confie en privé le Président. Pour autant, Carla entend rester à sa place. Elle, qui n'aime pas la politique, reste méfiante et entend surtout poursuivre sa carrière d'artiste. Un film et un disque sortiront cette année. En revanche, l'Elysée dément ce projet d'adoption relayé par certains magazines populaires.
Source : JDD